Collard, Christophe
Scénographe pionnier, Adolphe Appia a affirmé jadis que l’art de la production scénique se résumait à projeter dans l’espace ce que l’auteur originaire ne pouvait que projeter dans le temps (voir Leach, 2008). Plus concrètement parlant, à considérer le processus de l’écriture scénique on peut néanmoins constater l’émergence de ce que Guattari appelait « le pouvoir singulier de l’énonciation » (1992) des divers systèmes et méthodes de signification qui la rendent possible. Car, en abordant ledit processus par l’angle de la scénographie théâtrale à son tour dévoile l’acte de signification au sens le plus large du terme comme constituant un tissu immanent et collectif qui forme, transforme et opère sur le monde en temps réel. La perspective proposée rejoint donc celle d’une plateforme contribuant à une réflexion sur le principe d’une ‘présence permanente’ par le biais d’une métaphysique processuelle. C’est bel et bien dans cet esprit que la collaboration entre les architectes novateurs Diller+Scofidio et la troupe New Yorkaise The Builders Association donna lieu à la production Jet Lag (1998), décrite par Wehle comme « an adventurous cross-media performance » (2002) combinant action en temps réel, images ‘live’ et enregistrées, animation numérique, musique, ainsi qu’une dramaturgie dite ‘traditionnelle’ appliquée à deux personnages historiques succombant à leurs voyages à travers un présent permanent.